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RDC: La mission onusienne, une "énigme à déchiffrer" pour certains Congolais

- La Monusco est la plus importante opération de maintien de la paix déployée par les Nations Unies, avec 23 438 agents sur le terrain, dont près de 19 000 soldats.

Mohamed Hedi Abidellaoui  | 27.04.2017 - Mıse À Jour : 28.04.2017
RDC: La mission onusienne, une "énigme à déchiffrer" pour certains Congolais

Kinshasa


AA/ Nord-Kivu (RDC)/ Joseph Tsongo


Edison Mutondwe, un habitant de Beni, dans l’est de la République démocratique du Congo (RDC) ne comprend pas la "passivité" de la Mission onusienne (Monusco) : « Je vois d’un mauvais œil la façon dont les casques bleus de la Monusco suivent à partir de leurs camps, de leurs autos climatisés ou de leurs hélicoptères, les populations civiles en train d’être égorgés ou d’être kidnappé…sans secourir ni défendre les victimes. »

Se confiant au correspondant d’Anadolu, le jeune homme dit vouloir « déchiffrer une énigme ». Pourtant, la résolution du conseil de sécurité était claire, dit-il, et « recadre très souvent le mandat de la Monusco sur la protection des civils.

Mutondwe, la vingtaine, a aujourd’hui un seul bras ; il n’était cependant pas né handicapé. « J’ai perdu mon bras, à la suite d’une rafale de balles devant les installations de la Monusco. C’était en 2013, pendant que je tentais de me réfugier dans leur camp, fuyant une attaque perpétrée par des bandits armés dans le quartier. Malheureusement, la Monusco ne réagit jamais, à moins qu’il s’agisse d’une attaque contre sa base! », regrette le jeune homme congolais, émettant le souhait de voir les casques bleus plier bagages « rapidement ».

L’insécurité permanente qui règne dans le centre et l’activisme des groupes armés dans l’est et l’ouest du pays témoignent, selon lui, de l’incapacité de la Monusco à assurer la protection de la population.

N’y allant pas par quatre chemins, Etienne Kambale, rapporteur adjoint de la société civile du Nord-Kivu assène que « la présence de la Monusco n’a pas empêché la mort de milliers de civils dans le Kasaï et dans la région de Béni, depuis 2014 ».

« Des tueries à répétition se sont pourtant déroulées dans les zones où étaient actifs les casques bleus de la Monusco et l’armée congolaise», précise Kambale, louant, néanmoins, le travail de la brigade d’intervention rapide qui « a beaucoup joué dans la guerre contre le M23 (Mouvement du 23-mars, ndlr)».

- La Monusco, une mission « fantôme » ?

Une délégation de huit députés du parlement européens ayant récemment séjourné pendant quelques jours dans la province du Nord-Kivu, a, elle aussi, livré un constat qui interpelle. Evaluant l’action de la Monusco, sur les ondes d’une radio locale, la délégation a fustigé l’incapacité de la Mission onusienne, malgré les moyens dont elle dispose, à en finir avec les groupes armés locaux et étrangers qui écument l’est de la République démocratique du Congo.

« Il y a un véritable gaspillage de moyens et un manque d’actions efficaces. Aucun rapport avec une force de frappe puissante et la population reste sans protection», a déploré Javier Narte, député européen interrogé par "Radio Kivu 1", à l’issue d’un entretien entre la délégation européenne et le gouverneur de la province du Nord-Kivu.

Les huit députés, membres de la sous-commission Défense et Sécurité du parlement européen se sont, au demeurant, dits préoccupées par la situation sécuritaire au Nord-Kivu et ont appelé les Casques bleus de l’ONU à mener des actions concrètes pour mieux protéger la population civile face aux violences des groupes armés, dont l’activisme et le degré de nuisance restent encore élevés.

- Un bilan mitigé


Pour Jean-Paul Lumbulumbu, avocat et politicien actif en RDC, le bilan de la Monusco est plutôt mitigé : « Concernant la protection des civils, la plus grande réussite de la Monusco est sans doute la mise sur pied de la brigade d’intervention rapide, et la défaite de la rébellion du M23, vers la fin de 2013. Reste à déplorer les massacres des civils qui continuent face à une passivité remarquable de la Monusco qui peine à lutter contre les rebelles rwandais (FDLR). Pour cet avocat, la Monusco ne fait que « figer la situation sécuritaire » en République démocratique du Congo.

Depuis une vingtaine d’années, des dizaines de groupes armés étrangers et locaux qui pullulent dans la partie orientale de la RDC sont tenus responsables de nombreuses exactions dont sont victimes les populations civiles.

Il s’agit notamment des rebelles ougandais de l’Armée de libération du seigneur (LRA), d’autres rebelles ougandais des Forces démocratiques alliées (ADF), des Forces démocratiques pour la libération du Rwanda (FDLR) ainsi que d’innombrables groupes locaux d’auto-défense Mai-Mai (Nyatura, Simba, Mazembe, etc…)

La Monusco est, quant à elle, consciente des critiques et reproches qui lui sont faits par nombre de Congolais. D’ailleurs, lors d’une récente conférence de presse, son directeur de l’information, Charles Bambara, a riposté, soulignant que la Mission avait besoin davantage de moyens qualitatifs pour devenir « plus agile et proactive ».

La Monusco est la plus importante opération onusienne de maintien de la paix. Déployée en RDC depuis 1999, elle compte 23 438 agents sur le terrain, dont près de 19 000 soldats. Son mandat a été renouvelé fin mars 2016 par la résolution 2277, adoptée à l’unanimité du Conseil de sécurité. Les principaux pays contributeurs à cette Mission étant les Etats-Unis, le Japon, l’Allemagne, la France, le Royaume-Uni, l’Italie et la Russie.

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