Politique

L’Algérie rassure l’UE, son principal acheteur de gaz

- La 2ème réunion annuelle de haut niveau de Dialogue énergétique Algérie-UE a eu lieu la semaine écoulée à Bruxelles.

Hatem Kattou  | 18.04.2017 - Mıse À Jour : 18.04.2017
L’Algérie rassure l’UE, son principal acheteur de gaz

Alger

AA/Alger/ Khedidja Baba Ahmed

Proroger les contrats gaziers à long terme avec l’Europe en rassurant ce partenaire et appeler les pays de l’UE à investir dans le domaine, tels sont les deux objectifs que s’est apparemment assigné Nourredine Bouterfa, le ministre algérien de l’Energie qui prenait part, la semaine dernière, à Bruxelles, à la 2ème réunion annuelle de haut niveau de Dialogue énergétique Algérie-UE. Les arguments algériens ont-ils convaincu et Bouterfa a-t-il rempli son contrat ?

Si l’on s’en tient aux seules déclarations du ministre algérien et de Miguel Arias Canete, commissaire européen en charge du Climat et de l’Energie, la réunion du mardi 11 avril a été un succès. Malgré cette autosatisfaction, figure cependant quelques points, et non des moindres, qui attendent d’être réglés pour que l’horizon du devenir du marché du gaz algérien, s’éclaircisse.

L’Europe est « le marché le plus important pour le gaz algérien » a martelé Bouterfa. En effet, l’Algérie est le 3ème fournisseur en gaz naturel de l’Europe après la Russie et la Norvège. C’est là une position qu’il faut absolument préserver, selon le ministre.

L’enjeu ? Des contrats gaziers à long terme

Ce souci de maintenir coûte que coûte sa part dans le marché européen est conséquent aux menaces qui planent sur les contrats à long terme Algérie-pays de l’UE qui arrivent pour beaucoup à échéance en 2018- 2019 et que certains pays, et notamment l’Italie, envisageaient de ne pas renouveler.
L’Italie importe pour 19 milliards de m3 par an de gaz algérien. La livraison de gaz à long terme par gazoduc par l’Algérie pourrait être compromise, ont estimé les officiels italiens à cause de la forte consommation interne de gaz en Algérie d’une part et d’autre part, par le manque d’investissement et partant, l’engagement contractuel de ce pays avec l’Italie serait pour ce dernier, des plus problématiques.

C’est en substance ce que déclarait peu de jours avant la réunion de Bruxelles, le ministre italien du Développement économique «L’Italie souhaite diversifier ses sources et voies d’approvisionnement en gaz », car expliquait-il, « en raison des volumes actuels, on considère difficile que ces derniers contrats avec l’Algérie puissent être renouvelés ».
Il n’en fallait pas plus au ministre algérien de l’Energie pour profiter de la rencontre de Bruxelles pour tenter de faire dissiper les craintes de Rome, son importateur de gaz historique, mais des autres pays européens aussi.

Il l’a fait sans détours, dés l’ouverture de la rencontre de Bruxelles, pour donner le ton : « Nous intensifions les efforts d’exploration pour augmenter nos réserves afin, non seulement de répondre aux besoins croissants de notre marché intérieur mais aussi de consolider notre position comme acteur actif et fiable dans les marchés régionaux et internationaux ».
Des chiffres, ceux de l’Agence américaine d’information en énergie –EIA- sont alors utiles à rappeler et confortent le discours du ministre. La production gazière enregistrera une hausse à partir de 2018, après plusieurs années de stagnation et grâce à l’entrée en production de plusieurs champs gaziers dans le Sud-ouest du pays et du complexe gazier de Tiguentourine, à l’arrêt depuis l’attentat qu’il a subi en janvier 2013.

Pour cette agence, l’offre de gaz progressera d’un trillion de pieds cubes (Tcf) à partir de 2018. Le ministre algérien a rappelé que son secteur a engagé un plan de développement des ressources d’hydrocarbures qui a permis, pour la première fois, après plus de dix ans, d’accroitre la production en 2016 accompagnée de fortes augmentations des exportations, notamment en gaz.

L’Algérie a renforcé ses efforts d’exploration pour répondre aux besoins énergétiques du marché intérieur et parallèlement pour consolider sa position d’acteur fiable sur le marché international.

Deux-tiers des bassins sédimentaires non encore explorés

Et pour répondre à tous ceux qui s’interrogent sur le niveau réel des réserves algériennes en hydrocarbures, le ministre algérien affirme que ces réserves sont importantes (sans donner de chiffres sur celles prouvées) mais elles restent « relativement peu exploitées ».

Et de rappeler que l’Algérie est constituée de 1,5 millions de km² de bassins sédimentaires dont les deux-tiers n’ont encore subi aucune exploration dans le Sud-ouest et le Nord du pays et dans la zone off-shore d’une superficie de 100.000 KM² , totalement inexplorée.

C’est pourquoi l’Algérie a décidé d’ouvrir les portes aux partenaires étrangers pour qu’ils investissent dans ce domaine d’exploration. Cette ouverture a déjà pris forme avec la récente signature par Sonatrach avec l’italien ENI pour explorer les ressources pétrolières et gazières du pays et une participation dans l’offshore dans les régions de Bejaia (Nord) et d’Oran (Ouest).

L’UE convaincue mais à quel prix?

Se voulant convaincant, le ministre algérien a évoqué les infrastructures du pays qui sont de bonne qualité ; les conditions d’exploitation avantageuses et l’existence d’une ressource humaine de qualité. Ce n’est pas rien, y compris pour le commissaire européen chargé de l’action pour le climat et l’énergie, qui a jugé que « Si l’on considère le potentiel énergétique non exploité de l’Algérie, sa proximité géographique et l’existence de bonnes infrastructures de transport de gaz vers l’Europe, force est de constater que les conditions sont réunies pour que l’Europe profite davantage du gaz algérien et l’Algérie du marché européen ».

Toutefois, tempère le commissaire européen : « le cadre réglementaire algérien d’investissement doit être amélioré afin que l’Algérie devienne une destination plus attrayante pour les investissements européens …».

Les experts d’Alger comme ceux de l’Union européenne se consultent pour renforcer davantage, nous a-t-on appris « l’attractivité du cadre d’investissement ». Toute la question réside alors dans les concessions que pourrait faire l’Algérie à ses partenaires européens pour rendre son pays attractif.
Dans toutes ses relations avec les acteurs économiques étrangers, les règles algériennes pour l’investissement étranger butent sur leur complexité et constituent, disent beaucoup, un frein à l’investissement.

Aujourd’hui, il semble que l’on s’achemine, même si l’on ne le crie pas trop fort, vers des aménagements de ces règles, seule alternative du pouvoir algérien pour sortir de l’impasse.

Le ministre algérien de l’Energie a, de toute évidence, réussi à rassurer l’Europe sur ses capacités à tenir ses engagements contractuels sur le marché international. Ainsi, le 13 avril, soit deux jours après la rencontre Algérie-UE de Bruxelles, le ministre italien du Développement économique, Carlo Calenda, qui informait alors que de contrats à long terme, il n’en serait plus question, a appelé au téléphone le ministre algérien de l’Energie pour l’informer de la décision de son pays de renouveler ses contrats à long terme de livraison de gaz.

Une victoire, sans aucun doute, de l’Algérie que ce revirement à 360 degrés de l’Italie. Il reste juste à savoir à quel prix ce succès immédiat de Bouterfa et de son pays a été obtenu. En fait, si la pression mise par l’Italie sur l’Algérie n’était pas un moyen de jouer sur la baisse des prix de cession du gaz lors de la renégociation de ces contrats.



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