Sport, Afrique

Côte d'Ivoire - Cissé Issiaka, l’espoir du cyclisme africain (Portrait)

Hatem Kattou  | 24.04.2017 - Mıse À Jour : 25.04.2017
Côte d'Ivoire - Cissé Issiaka, l’espoir du cyclisme africain (Portrait)  Le 26ème tour cycliste du Togo a été remporté à Lomé par l’Ivoirien Issiaka Cissé(centre), au classement au temps. L’Ivoirien a parcouru les 6 étapes du tour, longues de 577.6 Km, en 14h 31min 11s avec une vitesse moyenne de 39.780 Km/h. ( Alphonse Logo - Anadolu Ajansı )

Abidjan



AA / Abidjan / Fulbert Yao

Du haut de ses 25 printemps, l’ivoirien Cissé Issiaka, a bien le guidon en main. Il s’est, à force de travail, fait un nom dans le milieu du cyclisme en Côte d’Ivoire et incarne aujourd’hui, l'espoir de cette discipline sportive dans le continent noir.

Pourtant, rien ne présageait cette belle aventure à Cissé. Issu d’une famille nombreuse et modeste, originaire d’Odienné (Nord), Cissé Issiaka est contraint, faute de moyens, de quitter les bancs de l’école dès son jeune âge, afin d’exercer le métier de mécanicien pour aider sa famille.

« Après l’arrêt de mes études, je me suis consacré au métier de mécanicien. Après plusieurs années d’apprentissage, puis j’ai passé un diplôme en mécanique», relate le sportif d’1m72 à Anadolu.

Le jeune prodige ne se contente pas de rêver de mécanique et de bruits des moteurs. Poussé par l’envie de transcender ses limites, Il se donne avant tout, les chances de réussir dans une autre discipline.

Dans la ville de Bouaké, qui l’a vu naître et où il passe son adolescence, il se met en tête l’ambition de devenir un jour un champion de cyclisme. Il fait alors des économies pour s’acheter son premier vélo.

« Je n’ai pas eu la chance des enfants dont les parents leur offrent des vélos comme cadeaux. C’est grâce à mon travail de mécanicien automobile que j’ai réussi à faire des économies pour m’offrir un vélo. Il me permettait au départ de me balader dans la ville et de faire des courses», raconte le cycliste.

Avec le temps, il se découvre une passion avec ce vélo : les acrobaties. Il intègre alors l’association des jeunes cascadeurs de vélo de la ville de Bouaké (Centre).

« Lorsque j’ai découvert les acrobates sur vélos, c’est à partir de cet instant que ma passion pour le vélo a pris de l’élan», confie t-il.

Après avoir donné ses premiers coups de pédale, huilé et graissé ses premières chaines dans ce milieu d’amateurs, Cissé Issiaka, quitte l’association, à l’âge de 17 ans, grâce à la complicité de Coulibaly Mamadou, encadreur des acrobates, pour s’engager, en 2009, dans le haut niveau avec l’équipe de la Société omnisport de l’armée ivoirienne (SOA) en 2009.

Il organise ses entraînements, apprend petit à petit le métier. Le vélo sur route devient alors son boulot. Fort de ses belles victoires remportées avec la SOA et grâce à ses atouts physiques et techniques, il finit par intégrer la sélection nationale ivoirienne de cyclisme.

Cette intégration s’avère avantageuse, car Cissé Issiaka s’appuie sur les moyens mis à sa disposition pour bien mouiller le maillot et glaner des lauriers. Depuis 2013, il poursuit sa progression en enchaînant les compétitions et remporte la même année, la septième place de la Tropicale Amissa Bongo, au Gabon.

Il gagne par la suite une étape lors du Grand Prix Chantal Biya, au Cameroun, une étape du Tour du Faso, au Burkina Faso et le classement général du Tour de la Côte d'Ivoire. Il remporte aussi la onzième édition du Tour de Madagascar. En 2015, il termine cinquième du Tour du Cameroun puis remporte le classement général du Tour de l'Est international.

En 2017, il remporte le 26ème tour cycliste du Togo, en s’imposant sur une distance totale de 577.600 km avec un temps de 14 h 31 min 11 sec et une vitesse moyenne de 39.780 km/h. 

Depuis le début de sa carrière, Cissé Issiaka a aussi tenté une aventure en Europe. En 2012, il intègre l’équipe du Centre mondial du cyclisme à Aigle en Suisse, où il a participé au contre-la-montre masculin des moins de 23 ans lors des championnats du monde.

Il part au Tour de l'Avenir en France, une des courses les plus importantes chez les espoirs. En 2015, il fait un bref essai chez le club de SC Nice Jollywear en France.

Les embûches dressées sur la voie du cycliste

«Je ne fais rien que du vélo. Malheureusement, je ne suis pas salarié, je vis que de primes, c’est difficile et j’espère que cela va changer. Aussi, avec l’âge, je stresse, je suis inquiet», explique t-il, le visage fermé.

Cissé Issiaka garde aussi de mauvais souvenir dans sa carrière. « Quand j’étais en stage à 14 ans, j’ai fait de très bons résultats. A l’âge de 24 ans, j’ai commencé à stresser. En 2015, je n’ai pas beaucoup couru parce que j’étais malade, quand j’ai repris en 2016, je me suis dit, il faut y aller, il faut y croire, il faut se battre», raconte t-il avec beaucoup d’amertume.

Pour tenir malgré ces nombreuses difficultés, Cissé issiaka s’appuie sur le soutien moral de ses coéquipiers en équipe nationale à l’instar d’Issiaka Fofana et Bassirou Konté...

Il se forge aussi un esprit de gageur en copiant le modèle de ces fans à l’international tels que les érythréens Merhawi Kudus et Daniel Teklehaimanot, premier cycliste noir africain à grimper sur un podium lors d’une étape du Tour de France.

« Quand je regarde Daniel Teklehaimanot, qui a été le premier africain a passer en professionnel, ça m’a beaucoup fait plaisir. C’est lui que je vise», avoue t-il.

Même s’il reconnait que le vélo lui ouvre certaines portes, il confesse cependant être inquiet pour son avenir, dès lors que le cyclisme en Côte d’Ivoire est loin d’être le sport numéro un.

« Ce n’est pas facile pour moi ici en cote d’ivoire, le vélo ce n’est pas comme en Erythrée ou il est aimé. Ici c’est le football. Donc, j’ai du mal à persévérer au niveau professionnel. Et puis, être professionnel, cela requiert beaucoup de moyens alors que je n’en dispose pas. Avec l’âge qui avance, je m’inquiète», soupire t-il.

Evoquant ses perspectives, ce jeune homme célibataire dit vouloir créer une école de vélo.

« Si je parviens à intégrer une grande équipe, je pense que je vais mettre des projets en place, aider les jeunes, lancer une école de formation. Et leur dire que l’Afrique recèle de talents qu’i suffit juste de repérer».

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