Ennahdha : "BCE a rejeté une offre financière émiratie mirobolante en contrepartie de notre exclusion"
Abdélkarim Harouni, a déclaré à l'Agence Anadolu que « Caid Essebsi, en tant qu’homme d’Etat patriote, a refusé cette offre, et affirmé que la Tunisie, un pays indépendant avec son peuple libre, sait identifier ses intérêts, et n’est point à vendre »
Tunisia
AA / Tunis / Yousra Ouanes
Abdelkarim Harouni, président du Conseil de la Choura du Mouvement tunisien Ennahdha, a révélé que « Les Emirats Arabes Unis ont tenté d’appâter le président disparu, Béji Caid Essebsi, avec une offre financière mirobolante (sans en déterminer le montant) en contrepartie de l’exclusion d’Ennahdha du pouvoir et de la vie politique et de mettre fin à l’expérience démocratique » [tunisienne].
La Tunisie est dirigée, actuellement, par une coalition composée de quatre principaux partis et d’un bloc parlementaire. Il s’agit du Mouvement Ennahdha (d’obédience islamique - 54 députés sur un total de 217), du Courant démocratique (social-démocrate - 22 députés), du Mouvement du Peuple (Nassérien, 15 députés), du Mouvement Tahya Tounes (libéral – 14 députés) et du Bloc de la Réforme nationale (indépendants et partis libéraux - 16 députés).
Et Harouni de déclarer à la correspondante de l'Agence Anadolu : « Cependant, Caid Essebsi (1926-2019) a, en tant qu’homme d’Etat patriote, rejeté cette offre et affirmé que la Tunisie, un pays indépendant avec son peuple libre, sait identifier ses intérêts, et n’est point à vendre ».
Caid Essebsi était président du parti « Nidaa Tounes » (Libéral) entre 2012 et 2014 et a occupé le poste de président de la République depuis la fin de l’année 2014 jusqu’à son décès en 2019.
« La révolution pacifique a démarré en Tunisie et nous n’exportons pas la révolution de même que nous ne l’importons pas. La Tunisie, qui a choisi son chemin, couronné par une transition démocratique consensuelle sans exclusion, est déterminée à se consacrer à relever les défis socioéconomiques », a souligné Harouni.
Un soulèvement populaire avait fait chuter, en 2011, le président tunisien de l’époque, Zine el Abidine Ben Ali, qui a gouverné le pays de 1987 à 2011. Ce mouvement de révolte populaire s’est propagé à d’autres pays arabes, tels que l’Egypte, la Libye, le Yémen et la Syrie.
« Tout au long des dix dernières années écoulées, nous avons été témoins de multiples tentatives menées par des forces hostiles à la révolution dans le Monde arabe pour avorter le Printemps arabe et les aspirations de nos peuples à la démocratie, depuis la Syrie en passant par le Yémen, l’Egypte et la Libye », a insisté Harouni.
Des observateurs critiques estiment que des régimes au pouvoir dans plusieurs pays du Golfe, dont les Emirats Arabes Unis, appréhendent l’arrivée de l’étincelle de la révolution à leurs contrées, raison pour laquelle ils mènent ce qui est connu comme une contre-révolution pour renverser les régimes au pouvoir dans des pays arabes ayant connu des révoltes populaires qui ont permis de faire chuter des régimes despotiques.
Cependant, ces accusations sont généralement rejetées par Abu Dhabi qui a des liens étroits avec le Régime en place au Caire actuellement. Le 3 juillet 2013, l’ancien président égyptien, Mohamed Morsi (2012-2013), premier président démocratiquement élu au terme d’une révolution qui a fait chuter le régime de Hosni Moubarak (1981-2011), a été renversé.
Et Harouni de poursuivre : « Ces pays se sont employés, via leurs agents en Tunisie, à entraver et à capoter l’expérience tunisienne ».
Il a souligné que la « Tunisie n’est pas un pays de coups d’Etat et notre armée, qui a pris partie avec la révolution, est attachée à la démocratie et est la tête de pont de notre bataille contre le terrorisme tout en bénéficiant du respect de tous les Tunisiens ».
« Les élections ne peuvent être truquées en Tunisie dès lors qu’elles se déroulent sous la supervision d’une instance indépendante sans omettre l’accompagnement et le contrôle d’une société civile active et d’une presse libre », a insisté Harouni.
« Compte tenu de l’échec de toutes les tentatives de faire exploser la situation sociale en exploitant à mauvais escient la souffrance subie par nos jeunes et nos régions, en termes de chômage et de carences de développement, ces parties hostiles se sont employées à faire échouer l’expérience tunisienne en la minant de l’intérieur de l’Etat. C’est ainsi que la première tentative fut avec le président Caid Essebsi », a détaillé Harouni.
« De guerre lasse, ils sont allés vers l’Algérie (voisine) et ont tenté, avec les parties à l'intérieur de l'Algérie de cibler l'expérience démocratique naissante en Tunisie, mais, l’Algérie, notre sœur aînée, leur a rétorqué que la stabilité de la Tunisie est une ligne rouge infranchissable et sont ainsi revenus désappointés », a-t-il relevé.
« La deuxième tentative est de l’intérieur de l’Etat, et c’est celle à laquelle nous assistons au sein du parlement à travers l’émergence de voix ennemies à la révolution et à la démocratie qui font propager un discours de haine et de violence entre les Tunisiens », a-t-il encore dit.
« Ces protagonistes n’ont plus d’autre choix que celui de s’organiser en partis politiques et de participer au processus électoral pour tenter d’entraver l’expérience tunisienne de l’intérieur même des institutions de l’Etat, et à leur tête le parlement. Ils [le Parti Destourien Libre, 16 députés) se sont employés à entraver les travaux du parlement et de ses commissions et à cibler son président Rached Ghannouchi » (président du Mouvement Ennahdha).
Et Harouni d’ajouter : « Toutes ces tentatives ont été infructueuses. La démocratie tunisienne est forte et les institutions de l’Etat sont légales et Ennahdha est un Mouvement consensuel qui vise à préserver l’unité nationale afin que la Tunisie parvienne à relever le défi socioéconomique, qui s’est aggravé après la pandémie de la Covid-19 ».
Il a fait part de leur « souci à l’intérieur du Mouvement de préserver de bonnes relations avec tous les Etats arabes dans le cadre de la politique extérieure de la Tunisie, qui refuse d’adhérer à la politique des axes et qui s’emploie à faire prévaloir les solutions pacifiques à la faveur du dialogue entre les frères ».
« Ennahdha travaille dans le cadre de cette politique officielle et défend les intérêts supérieurs de la Tunisie », a conclu Harouni.
La Tunisie est considérée par de nombreux observateurs comme étant l’unique expérience démocratique réussie parmi les pays arabes qui ont connu les révoltes du Printemps arabe.
*Traduit de l'Arabe par Hatem Kattou
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