Est de la RDC : les populations fuient Goma vers Bujumbura et Kampala
- A travers le poste frontière de la "Grande Barrière", entre la RDC et le Rwanda.

Congo, The Democratic Republic of the
AA / Tunis / Salim Boussaïd
Les populations continuent de fuir la ville de Goma, principale agglomération de l'est de la République démocratique du Congo (RDC), tombée sous l'emprise des rebelles du M23 le 27 janvier dernier, en direction des pays voisins, en l'occurrence le Burundi et l'Ouganda.
L'information a été rapportée, mercredi, par l'Agence congolaise de presse, citant des témoins sur place.
"La Grande barrière (frontière République démocratique du Congo - Rwanda) ne désemplit pas, la population quitte Goma, ville-martyre de l'est du pays, à destination de Bujumbura (Burundi) et Kampala (Ouganda), sans jamais s'établir à Kigali, au Rwanda", a rapporté l'agence.
Les populations en détresse redoutent une reprise des combats dans la ville entre les Forces armées de la RDC (Fardc) et les rebelles du M23.
"Il y aura une contre-offensive des FARDC (Forces armées de la RDC). Je ne souhaite pas vivre l'enfer ici à Goma. Mais ma destination finale est Bujumbura. Impossible de rester à Kigali ou même au Rwanda", s'est confié un citoyen à l'agence congolaise qui publiait des photos montrant de longues files d'attente au poste-frontière entre la RDC et le Rwanda.
Avant sa chute, la ville de Goma était une destination privilégiée des réfugiés venant d'autres localités dans l'est de la République démocratique du Congo, touchées par les violences.
Pas moins de 110 mille de ces réfugiés ont dû repartir vers d'autres zones en RDC, selon Jens Laerke, porte-parole du Bureau de coordination des affaires humanitaires de l’ONU (OCHA), dans une déclaration, mardi.
"Des milliers de personnes quittent les sites pour personnes déplacées à l’intérieur et autour de Goma et se déplacent vers des zones où il n’y a pas de combats", a-t-il affirmé.
Ces mouvements de populations interviennent alors que le M23 a sommé les déplacés d'évacuer certains sites à l’ouest de Goma, dans un délai de 72 heures. Cet ultimatum devait arriver à expiration, mardi 11 février.
Pour rappel, après plusieurs semaines de combats contre les Fardc, les rebelles du M23 ont pris le contrôle de Goma, chef-lieu de la province du Nord-Kivu.
Le Mouvement du 23 Mars a été créé en 2012 par des militaires dissidents de l’armée congolaise. Après une brève montée en puissance, il a été défait en 2013 par les Fardc, appuyées par les Casques bleus de la Monusco. Cependant, le M23 a repris les armes en 2022, s’emparant de plusieurs localités dans la province du Nord-Kivu, située à la frontière du Rwanda et de l’Ouganda.
Kinshasa accuse le Rwanda de soutenir activement le M23 pour accéder aux richesses minières de la région. Ces accusations sont étayées par des rapports d’agences onusiennes, qui pointent un appui militaire rwandais au mouvement rebelle. Pour la RDC, le M23 est un groupe ‘’terroriste’’ et toute forme de négociation est catégoriquement rejetée.
Le Rwanda réfute ces allégations, affirmant que le M23 est un mouvement congolais dirigé par des Congolais, bien que ses membres parlent le kinyarwanda, la langue rwandaise. Kigali rejette également les conclusions des rapports onusiens et rappelle avoir désarmé les rebelles du M23 qui s’étaient réfugiés sur son sol en 2012-2013, avant de remettre leur arsenal aux autorités congolaises.
Pour Kigali, ‘’la question du M23 est une menace sécuritaire pour le Rwanda’’. ‘’La RDC, à cause de l’assimilation permanente du M23 au Rwanda, a bâti une large coalition militaire avec des soldats burundais, avec des mercenaires européens, des miliciens Wazalendo et des génocidaires FDLR (Forces démocratiques de libération du Rwanda, ndlr)’’, avait soutenu le ministre rwandais des Affaires étrangères, Olivier Jean Patrick Nduhungirehe, dans une interview accordée à Africa 24.
Ces alliances, selon Nduhungirehe, s’inscriraient dans une stratégie visant à renverser le gouvernement rwandais.
Pour l'heure, la situation demeure instable.
Un sommet de la Communauté de l’Afrique de l’Est (CAE) et de la Communauté de développement de l’Afrique australe (SADC), tenu samedi dernier à Dar Essalam en Tanzanie, a appelé les chefs des forces de défense déployés dans la région à mettre en place un ‘’cessez-le-feu immédiat et inconditionnel’’ dans un délai de cinq jours, avec la perspective d'ouvrir un dialogue entre les autorités congolaises et les rebelles du M23.
Kinshasa en a pris note.