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RDC : Les morts se reposent mieux au village

Dans l’imaginaire collectif, être enterré dans un cimetière clanique est une preuve d'appartenance à un milieu qui confère au défunt ou à sa famille la qualité d'ayant-droit, en cas de conflits fonciers.

Mohamed Hedi Abidellaoui  | 22.02.2017 - Mıse À Jour : 23.02.2017
RDC : Les morts se reposent mieux au village

Congo, The Democratic Republic of the


AA/ Kinshasa/ Jospeh Tsongo


Aujourd’hui, le souci de pérenniser les relations avec les aïeux reste, parmi tant d’autres, la principale raison qui justifie le rapatriement de plus en plus de dépouilles mortelles au village, en République démocratique du Congo (RDC). Dans l’imaginaire collectif congolais, les morts se reposent mieux au village. Les gens redoutant les obscénités et les sacrilèges, très courants en ville, lors des deuils ou pendant l’enterrement.

Au village, ce n’est pas pareil. Les sépultures sont sacrées et jouissent de soins particuliers. Du coup, les morts retournent au village. C’est qu’ils sont de plus en plus rapatriés vers leurs villages au Nord-Kivu, où ils reposent en paix mieux qu’en ville, selon la croyance populaire.

Le corps de Mwami Ndeze, ressortissant du territoire de Rutshuru, décédé brutalement en Belgique a été rapatrié par sa famille au village pour y être enterré. En Juillet 2016, la dépouille de l’abbé Apollinaire Malumalu, ex-président de la Commission électorale nationale indépendante (CENI), mort à Dallas aux Etats-Unis, a été rapatriée à Lubero, son territoire d’origine. Quelques semaines plus tard, le patriarche Bisukiro Tabaro Marcel originaire du Rutshuru dans l’Est est mort dans la capitale congolaise Kinshasa. Sa dépouille a été acheminée vers la terre de ses ancêtres, au fin fond de la province du Nord-Kivu.

Scrutant le cortège funèbre, Jonathan Kasiko, un sexagénaire a extériorisé sa pensée: « Moi aussi, je voudrais être enterré auprès des miens. Dès que l'on me paye ma pension, je mettrai de côté un peu d’argent pour l’organisation de mes obsèques... ».

Depuis quelque temps, être enterré chez-soi est devenu un rituel pour les communautés qui peuplent la province du Nord-Kivu. Moïse Garubanda, activiste de la société civile dans la région, explique que le retour progressif à cette tradition est dicté par le peu de respect réservé aux morts auprès des citadins. « Maintenant, malgré l’impraticabilité des routes à l’intérieur de la province, on se donne la peine d'accéder par véhicule, à des coins hier encore enclavés. On se paye le "luxe" d'aller y enterrer des membres de sa famille», affirme-t-il.

Très en vogue aujourd’hui, la pratique fait, toutefois, face à la dégradation de la situation socio-économique qui prévaut en RD Congo et encore plus dans la province du Nord-Kivu. « Actuellement, nous avons une association regroupant des ressortissants du groupement de Kanyabayonga. Avec des cotisations, nous disposons d'assez de moyens pour couvrir les frais funéraires. On ne sent vraiment plus le coût lié à ces obsèques. Même des enfants décédés en ville sont enterrés au village... », se félicite Hangi Richard, habitant de la région.

Nombreux sont les Congolais qui exigent d’être enterrés dans leurs villages nataux. Pour Samuel, un autre habitant du Nord-Kivu, il y a une ligne directrice : « La dernière volonté du défunt doit être respectée, sous peine d'encourir une malédiction... », dit-il.

En ville, on enterre les morts comme l'on veut et on profane les tombeaux. « La tombe est considérée, comme un véritable lieu de repos éternel... », reprend Samuel. Dans l’imaginaire collectif, être enterré dans un cimetière clanique est une preuve d'appartenance à un milieu qui confère au défunt ou à sa famille la qualité d'ayant-droit, en cas de conflits fonciers, extrapole-t-il.

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