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Tunisie - dissolution du CSM: les jeunes magistrats brandissent la menace de la démission collective

- Le président de l’ATJM a déclaré que les jeunes magistrats « poursuivront la lutte », laissant planer la menace d’une démission collective si Kaïs Saïed maintenait sa décision de dissoudre l’organe judiciaire

1 23  | 11.02.2022 - Mıse À Jour : 11.02.2022
Tunisie - dissolution du CSM: les jeunes magistrats brandissent la menace de la démission collective

Tunisia

AA/Tunis

Le président de l'Association tunisienne des jeunes magistrats (ATJM), Mourad Messaoudi, a déclaré vendredi, que la décision du président de la République, Kaïs Saïed, de dissoudre le Conseil supérieur de la magistrature (CSM), « nous met dans une situation de péril imminent », s'engageant à « poursuivre la lutte » si le locataire de Carthage ne reconsidérait pas sa décision.

C’est ce qui ressort d'une conférence de presse organisée par l’ATJM (non gouvernementale) au Palais de Justice de Tunis.

« La décision du chef de l’Etat nous met dans une situation de péril imminent, et s'il ne compte pas la reconsidérer, nous poursuivrons la lutte, les grèves et prévoyons même de présenter notre démission collective s’il le faut », a déclaré Messaoudi.

Et le président de l’ATJM d’ajouter, « Le système judiciaire ne peut être organisé et régi par décret (…) cette décision relève de la contre-révolution ».

Dans ses déclarations accordées à l’Agence Anadolu (AA) à l’issue de la conférence de presse, Messaoudi, s’est dit surpris par les déclarations du chef de l'État à l’endroit de certains juges, estimant qu’elles « portent préjudice au Conseil supérieur de la magistrature et à ses membres ».

Il juge « erronées » les accusations du chef de l’Etat à l’encontre des magistrats.

« Nous sommes convaincus de l’indépendance et de l’impartialité du pouvoir judiciaire », a-t-il assuré, dans une allusion faite au rôle du Conseil supérieur de la magistrature, qui est garant de l’indépendance de l’autorité judiciaire.

De son côté, la secrétaire générale de l’ATJM, Leïla Douss, a souligné lors de cette conférence de presse, « Nous voulons certes une réforme, élaborée de manière participative et non unilatérale, qui va à l’encontre du processus démocratique ».

« Pourquoi nous n’avons pas été associés à l’élaboration de ce projet de réforme ? », s’est interrogée la secrétaire générale de l’ATJM, soulignant que les jeunes magistrats ont appelé le président de la République à cette fin, sans obtenir gain de cause.

De son côté, Ghazi Boukhris, trésorier de l'ATJM, a déclaré à AA en marge de la conférence de presse, qu’ « il existe des mécanismes de réforme qui peuvent être discutés dans un cadre plus propice que celui imposé par la décision de dissolution ».

« La porte du dialogue reste ouverte et nous sommes prêts à présenter de nouvelles propositions », a-t-il souligné.

Jusqu’à 11h40, il n'a pas été possible d'obtenir un commentaire officiel de la Présidence tunisienne sur les déclarations des responsables de l’ATJM.

Le président tunisien, Kaïs Saïed, avait indiqué, jeudi, lors d’une réunion du Conseil des ministres que la dissolution du Conseil supérieur de la magistrature est maintenue. Il a précisé qu’un décret présidentiel portant dissolution du CSM et son remplacement par un autre organe judiciaire, sera émis à cet effet.

Par voie de communiqué, rendu public dimanche, le CSM avait rejeté sa dissolution en l'absence d'un mécanisme juridique et constitutionnel permettant cette mesure, de même que de nombreux instances judiciaires et partis politiques ont rejeté la dissolution du Conseil.

La dissolution du CSM a également suscité l’inquiétude des chancelleries étrangères et une grave polémique à l’intérieur du pays tout comme à l’étranger, au milieu des appels à rétablir l’organe judiciaire.

Le CSM est une instance indépendante inscrite dans le texte de la Constitution, chargée, entre autres de garantir l'indépendance de la justice, de sanctionner les magistrats et de gérer leurs promotions et carrières.

La Tunisie est en proie depuis le 25 juillet dernier à une crise politique aiguë, lorsque Kaïs Saïed avait imposé une série de mesures d'exception, s’agissant, notamment, de la suspension des activités du Parlement et du limogeage du chef du gouvernement, tout en accaparant le pouvoir exécutif et en légiférant par voie de décrets.

Saïed, qui avait entamé un mandat présidentiel de cinq ans en 2019, a dit que ses décisions sont des mesures prises dans le cadre de la Constitution pour protéger l'Etat « d'un péril imminent », mettant l'accent sur la préservation des droits et des libertés.


*Traduit de l’arabe par Majdi Ismail







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