Tunisie - Matmata, la ville des Amazighs sculptée sous terre
- Les maisons ont été creusées il y a de cela des siècles mais à ce jour y vivent des milliers de personnes dont certains ouvrent leurs portes aux touristes qui visitent la vieille ville de Matmata
Tunisia
AA / Matmata (Tunisie) / Haithem Mahdi
Tout au début, il se peut que le visiteur de la ville de Matmata ne s'aperçoive pas des maisons creusées sous terre car la première image qui lui apparaît c'est celle d'une oasis immensément étendue. Mais dès qu'il s'approche un peu de l'entrée de la ville qui relève de la province de Gabès (378 Km au Sud de la capitale Tunis), apparaissent à sa vue des maisons creusées par les Amazighs de Tunisie il y a des siècles.
Les Amazighs sont des peuplades qui habitent la région s'étendant de l'oasis Siwa dans l'ouest de l'Egypte jusqu'à l'océan atlantique, et du nord de la mer méditerranée jusqu'au Grand Sahara.
Les maisons des Amazighs sont devenues aujourd'hui un site de visite pour les touristes venant de Tunis et du reste du monde, attirés par leur architecture, leurs murs de sable et leurs anciennes sortes.
Ces maisons que les Tunisiens dénomment "le creuset domicilial" gardent l'empreinte avec laquelle elles ont été construites, et continuent à assurer le logement deprès de 5000 habitants de cette vieille ville.
On cite très souvent que Matmata est le nom d'une vieille tribu qui n'avait pas pu lutter contre les combattants de la tribu de Béni Hilal, et à du s'expatrier vers cette difficile région du sud de la Tunisie. Elle a creusé ses logements dans son sous sol afin que d'une part ses ennemis ne la voient pas et d'autre part de s'adapter au climat étant donné que ces profondeurs sont douces en été et chaudes en hiver.
Cette ville, réputée par son relief montagneux et son climat froid, est peuplée par les Amazighs dont certains parlent toujours leur dialecte- que les Tunisiens appellent "chelha", outre la langue arabe. La majorité des habitants ont quitté ces creusets pour aller vivre dans des constructions de pierre et de ciment dans la ville moderne de Matmata. Mais quelques uns continuent à vivre dans ces grottes, et demeurent attachés à l'Histoire, aux mœurs et aux traditions amazigh.
Près de 2 Km du centre de la ville, se situe le logement de la famille de Taoufik Ben Naceur, logement creusé dans une grotte. Ce logement, de 300m² de superficie, prend une forme circulaire, au centre de laquelle une vaste cour et dix chambres disposées en deux niveaux : un étage supérieur destiné à emmagasiner l'orge et les autres denrées alimentaires; l'étage inférieur est réservé à l'habitation avec ses pièces peintes de la couleur de l'argile tandis que les portes sont peintes en blanc pour la plupart.
Parlant à Anadolu de sa demeure, Taoufik Ben Naceur (51 ans) déclare : "L'âge de cette demeure est plus de 400 ans et elle est creusée dans une grotte de la montage, sculptée avec une argile qu'on appelle "Ellazemza", sorte d'argile solide et consolidée pour empêcher la destruction du logement. Creuser ce genre de grotte prend généralement deux à trois mois et sa profondeur est de trente mètres.
Durant toute la journée, la famille Ben Naceur ouvre sa maison aux visiteurs tunisiens et étrangers et leur permet de visiter librement toute la demeure y compris les salles de séjour et les chambres à coucher. Et le propriétaire d'ajouter : "Notre maison est ouverte aux touristes pour qu'ils prennent connaissance du mode de vie des Amazighs depuis des siècles. Nous leur présentons le modèle de notre vie quotidienne, dont la fabrication du pain, la moulure de l'orge, les techniques de nos ancêtres dans l'aménagement de l'espace pour dormir (ils l'appelaient "Essedda", genre de lit fabriqué d'argile)".
A l'intérieur de la maison, la famille Ben Naceur offre un petit déjeuner ou un déjeuner composés de pain d'orge, cuit sur place, d'un peu de confiture naturelle, du beurre et de l'huile.
Générosité dans un récipient
Les familles qui ouvrent leurs portes aux touristes, n'exigent aucun droit d'entrée, et leur permettent de circuler librement et gratuitement dans la demeure. Commentant cette pratique, Ben Naceur souligne : "Notre demeure n'est pas un musée pour que l'on exige quelque paiement, mais je reste persuadé que du moment que tu lui souhaites la bienvenue, le touriste sera à son tour généreux et t’offrira de l'argent".
Dans la maison se promenait Mohamed, un Algérien qui a confié à Anadolu : "Vraiment, j'ai vu plusieurs sites en Tunisie, mais je n'ai jamais vu autant de convivialité et toute cette simplicité. Les habitants te souhaitent la bienvenue chez eux d'une manière très sympathique."
1000 visiteurs par semaine
Ce site est visité par mille personnes par semaine pendant l'hiver, notamment pendant les vacances scolaires et universitaires, soulignent les responsables locaux.
Matmata est considérée comme un site touristique, et les visiteurs s'y dirigent afin de découvrir sa nature ensorcelante, réputée par ses maisons creusées sous terre; même les hôtels sont des ensembles de grottes reliées par de longs tunnels.
Les hôtels les plus connus sont : l'hôtel "Marhala" (L'étape) qui a été creusé en 1970 et qui a servi au tournage du film "Star Wars" du cinéaste Georges Lucas et qui a été de nature à faire connaître davantage la ville et par la même à multiplier le nombre de ses visiteurs.
Selon Adel Sbita, responsable de l'Office National du Tourisme dans la province de Gabès, il existe à Matmata 80 logements creusés mais étant donné que leur entretien est coûteux, 12 seulement sont exploités au niveau touristique.
Sbita précise à Anadolu :"Il n'existe pas de réglementation concernant ces maisons mais nous faisons de notre mieux pour assurer des procédures réglementaires afin d'attirer plus de touristes et ce, en coordination avec les autorités sécuritaires et les guides touristiques professionnels".