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France : des militants antiracistes s'opposent à l'islamophobie dans la gauche

- Un collectif d'élus et d'acteurs associatifs ont récemment publié sur les colonnes du journal "Libération", une tribune, pour mettre en garde contre une instrumentalisation de la laïcité « à des fins racistes ».

Lassaad Ben Ahmed  | 15.10.2019 - Mıse À Jour : 16.10.2019
France : des militants antiracistes s'opposent à l'islamophobie dans la gauche

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AA / France / Fawzia Azzouz

En France, depuis les années 90, l'islamophobie est un sujet sur lequel les militants antiracistes ne cessent d'alerter. Au fil du temps, elle prend la forme d'éternelles polémiques, essentiellement portées sur la visibilité des communautés musulmanes.

Un collectif d'élus et d'acteurs associatifs ont récemment publié sur les colonnes du journal "Libération", une tribune, pour mettre en garde contre une instrumentalisation de la laïcité « à des fins racistes ».

Revenant, dans un premier temps, sur la loi de 2003 qui interdit le port des signes religieux à l'école, ils rappellent que « cette loi faite sur mesure à l'encontre des musulmans » constitue le point de départ d'un « engrenage ».

Les signataires, parmi lesquels le militant des quartiers populaires Youcef Brakni, ou encore Madjid Messaoudène, rappellent dans cette tribune que les attaques visant les communautés musulmanes ne sont pas isolées et concernent, tour à tour, « l'accompagnement des sorties scolaires par des mamans portant le voile, le [burkini] à la plage, le hijab de running, le fast-food halal », avec « chaque saison sa polémique ».

« L’islamophobie peut devenir meurtrière, à l’image de la tuerie de Christchurch, en Nouvelle-Zélande. Tuerie dont l’auteur a été inspiré par l’ultra-droite française identitaire », préviennent les auteurs de cet écrit partagé plusieurs centaines de fois sur les réseaux sociaux.

Ils expliquent que s'ils sont déterminés à faire de l'islamophobie « une question centrale », « ce n’est pas juste par principe ou pour le plaisir de débattre », mais bien « parce que les conséquences sont dramatiques au quotidien en France, et plus particulièrement en banlieue », où les citoyens de confession musulmane, ou perçus comme tels, sont confrontés à des « discriminations multiples (emploi, logement… ou même entrée au restaurant !), agressions verbales et physiques, mise au ban de la société, stigmatisation, humiliations ».

Les signataires de la tribune demandent solennellement « à tous les mouvements politiques qui se réclament des valeurs progressistes (…) de prendre position sur cette question, d’avoir une ligne claire, de la dénoncer partout où elle s’exprime et de travailler à éradiquer l’islamophobie de leurs discours et de leurs rangs en commençant par la reconnaître pour ce qu’elle est : une des formes, hélas, de plus en plus répandue du racisme et de la violence subie par des pans entiers de la population au quotidien ».

Considérant que les multiples attaques et polémiques qui visent les musulmans ne proviennent pas exclusivement de la droite ou de l'extrême droite, mais aussi régulièrement de la gauche et de l'extrême gauche, ils mettent en garde ceux « qui nient » ce fléau et ne veulent « plus rien avoir à faire avec celles et ceux qui en arrivent à propager eux-mêmes cette haine ».

Dans un entretien à Anadolu, Madjid Messaoudène, conseiller municipal à Saint-Denis (banlieue parisienne), précise que « l'idée de ce texte est de dire que l'islamophobie est partout à gauche » tandis que « beaucoup de personnes pensaient qu'il s'agissait d'un épiphénomène ».

« Au sein de la France Insoumise (extrême gauche), il y a une tradition islamophobe liée à l'anticléricalisme primaire qui est à l'origine de la création de nombreux partis politiques de gauche et qui s'est transformé en rejet des pratiquants », déplore-t-il.


Enfin, il met en garde contre « la hiérarchisation insupportable » des racismes qui « est faite par de nombreux partis et organisations ». Le militant, très actif sur les réseaux sociaux appelle ainsi les organisations de gauche à se positionner clairement sur « la question de l'islamophobie et des quartiers populaires », sans quoi, « elles ne pourront plus jamais être des alliés ».

Une pétition a également été diffusée samedi 5 octobre sur la toile appelant à « lever les ambiguïtés que l'on trouve à gauche », s'agissant d'islamophobie.

Pour Ali Rahni, militant associatif à Roubaix (Nord), lui aussi signataire de cet écrit, sa parution était « nécessaire à quelques mois des élections municipales pour forcer les responsables politiques à se positionner ». Il estime qu'en « tant que citoyens responsables, il est vital de se mobiliser ».

S'agissant du danger que représente l'islamophobie, il rappelle que c'est un fléau « qui tue » et qu'après les paroles racistes, « viennent les passages à l'acte », comme c'est déjà arrivé lors de la terrible tuerie qui a fait 51 morts dans deux mosquées à Christchurch.

Les inquiétudes des auteurs de cette tribune devraient continuer de croître après les propos du ministre de l'Intérieur, Christophe Castaner, qui a expliqué la semaine dernière durant son audition devant la commission des lois de l'Assemblée nationale, que le « port de la barbe » ou la « conversion à l'Islam » pouvaient constituer un signe de radicalisation religieuse, provoquant l'indignation de nombreux acteurs musulmans engagés contre la stigmatisation des musulmans et l'islamophobie qu'elle génère.

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