AA / Tunis / M. Belhaj

Après une journée de visite à Mayotte, le Premier ministre français François Bayrou a présenté, lundi, un plan baptisé « Mayotte debout » pour répondre aux ravages causés par le cyclone Chido en décembre.

Arrivé à Mamoudzou à la tête d’une délégation composée de plusieurs ministres, il a annoncé devant le Conseil départemental de Mayotte une série de mesures d’urgence et à long terme pour la reconstruction de l’archipel.

** Une loi d’urgence en préparation

Une « loi d’urgence » sera présentée en Conseil des ministres, vendredi, avec une discussion au Parlement prévue « sous quinze jours », a annoncé François Bayrou. Ce texte vise à encadrer les actions immédiates et futures pour Mayotte.

Un établissement public de refondation de Mayotte qui absorbera l’actuel établissement foncier, avec une personnalité nommée à sa tête le 3 janvier, sera chargé de coordonner les différentes étapes.

Cette structure donnera « toute leur place aux élus », a-t-il assuré, ajoutant que des fonds européens allaient être mobilisés après une évaluation des dommages qui se terminera fin janvier. Un projet de « loi programme de refondation » qui sera finalisé « dans les trois mois ».

Le premier ministre a de même révélé l’organisation d’un recensement de la population du territoire, sous l’autorité des maires. « Une opération vérité » pour « sortir des incohérences », a-t-il affirmé.

** Priorité à l’électricité et à l’eau

Le chef du gouvernement français a promis le rétablissement de l’électricité dans tous les foyers avant la fin janvier. « Le renfort de 200 agents, l’envoi de 200 groupes électrogènes et l’arrivée de 20 techniciens EDF dès la semaine prochaine » permettront d’atteindre cet objectif, a-t-il précisé.

En matière d’eau potable, François Bayrou a affirmé qu’une intervention de l’armée permettra un retour à la production de 38 000 mètres cubes par jour « avant la fin de la semaine ».

Ainsi, deux unités en provenance des 13e et 19e régiments du génie, spécialisées sur les opérations d’urgence arriveront en renfort, dès la semaine prochaine, pour aider notamment les équipes locales sur le réseau de distribution d’eau.

** Logement et interdiction des bidonvilles

Bayrou a annoncé la livraison de « 140 tonnes de bâches dans la semaine », s’ajoutant aux « 100 tonnes déjà livrées », qui seront utilisées pour mettre hors d’eau les logements. Tandis que des éléments de charpente et de tôle seront acheminés pour les reconstructions, et inclus dans « la liste des produits à prix bloqués ».

Le nouveau locataire de Matignon a également martelé l’engagement de l’État à « empêcher la reconstruction des bidonvilles », une mesure qui pourrait être inscrite dans la future loi. Pour aider les familles, des « prêts garantis par l’État » seront proposés, assumés par la Banque des territoires.

**Relance économique et soutien aux entreprises

Face aux difficultés économiques engendrées par le cyclone, François Bayrou a annoncé la suspension des cotisations sociales pour toutes les entreprises de Mayotte jusqu’au 31 mars. Une aide financière d’urgence à hauteur de « 20 % du chiffre d’affaires moyen » sera mise en place, plafonnée à 20 000 euros par entreprise.

**Éducation : des mesures adaptées

La rentrée scolaire est prévue pour le 13 janvier, selon des modalités spécifiques à chaque établissement. « Une scolarisation temporaire pourra être organisée dans l’Hexagone pour certains élèves », a-t-il ajouté, insistant sur la priorité donnée aux classes préparant des examens.

Et de poursuivre : « On l’a fait pour l’Ukraine, on peut le faire pour les enfants mahorais qui seraient en difficulté, si les familles le souhaitent. »

Bayrou a également évoqué une « évacuation des collèges, écoles et lycées » où les sinistrés avaient trouvé refuge depuis le passage du cyclone, avec « mise à l’abri » des personnes et « reconduite à la frontière pour celles qui seraient en situation irrégulière ».

Un « plan vigilance » sera par ailleurs déployé pour protéger les établissements scolaires contre les menaces d’incendie et de pillage. « On ne peut pas laisser nos écoles brûler ou être pillées chaque jour », a-t-il déclaré, annonçant une collaboration entre l’armée et la gendarmerie.

** Amélioration des communications et transports

Le déploiement de 200 antennes Starlink permettra de rétablir les communications en urgence. D’ici deux ans, un réseau de fibre optique sera installé sur l’ensemble de l’archipel.

Par ailleurs, « l’aéroport Marcel-Henry sera rouvert pour les vols commerciaux à partir du 1er janvier », permettant le rapatriement des habitants « retenus hors de France à cause de la catastrophe ».

**Un plan d’urgence pour la santé

Face à la crise sanitaire, le Premier ministre a annoncé la mobilisation de la réserve sanitaire de Santé publique France pour garantir la continuité des soins. Les centres hospitaliers de l’Hexagone parraineront l’hôpital de Mayotte afin de renforcer les capacités locales.

Pour répondre aux besoins immédiats, les droits des patients seront maintenus, y compris pour renouveler les traitements sans ordonnance, en cas de perte liée au cyclone.

François Bayrou a également annoncé la mobilisation des infirmiers libéraux de Mayotte, qui formeront une soixantaine d'équipes santé-secours pour pratiquer une médecine de proximité dans le cadre de la démarche d’« Aller-vers », soutenue par Emmanuel Macron.

Le chef du gouvernement français a également annoncé la création d’un deuxième institut de formation en soins infirmiers à Mayotte, pour répondre aux besoins croissants de personnel qualifié. De plus, les médecins scolaires et ceux de la Protection maternelle et infantile (PMI) seront autorisés à prescrire pour renforcer la réponse au défi sanitaire.

En matière de gestion des déchets, un plan sera déployé pour leur destruction ou valorisation, avec le traitement des déchets ménagers prévu « dans le mois » et des solutions pour les déchets lourds et la biomasse.

**Une importante mobilisation gouvernementale

François Bayrou était accompagné de plusieurs ministres, dont la ministre de l’Éducation Élisabeth Borne, celui de l’Outremer Manuel Valls et la ministre du Logement Valérie Létard.

Affirmant comprendre que « les Mahorais ont souvent le sentiment que ce qu’on leur apporte, ce sont des assurances, de belles paroles de solidarité dans les déclarations », le premier ministre a déclaré : « Ce qu’ils veulent, c’est du réel ».

« Ce plan n’est qu’un début », a assuré François Bayrou. « Il ne s’agit pas seulement de reconstruire Mayotte comme elle était, mais de dessiner un avenir différent pour l’archipel », a-t-il affirmé.