Soutien à Daech : La lourde condamnation de Lafarge aux Etats-Unis interpelle sur le volet français
- Les délais de la procédure pénale lancée depuis plusieurs années en France suscitent remous et interrogations.
France
AA/Nice/Feïza Ben Mohamed
Au lendemain de la lourde condamnation du cimentier français Lafarge à une amende de 778 millions de dollars aux Etat-Unis pour avoir soutenu plusieurs groupes terroristes dont Daech en Syrie, les réactions se font quasiment unanimes.
Le groupe, qui a, en effet, plaidé coupable des accusations portées par la justice américaine, est également poursuivi par la France.
Mais les délais de la procédure pénale, lancée depuis plusieurs années, interpellent.
- Chronologie du volet pénal
L’affaire, qui s’apparente à un véritable scandale d’Etat, a été révélée par le journal Le Monde dès 2016, mais n’a abouti aux premières mises en examen qu’à la fin de l’année 2017.
C’est à ce moment-là que plusieurs cadres dirigeants de Lafarge, dont Bruno Pescheux, directeur de la filiale syrienne du groupe entre 2008 et 2014, et son successeur, Frédéric Jolibois, ont été inculpés pour des faits de « financement du terrorisme », « mise en danger d’autrui » et « violation du règlement européen ».
Le groupe Lafarge a, quant à lui, été mis en examen en juin 2018 en tant que personne morale pour « violation d’un embargo », « financement d’une entreprise terroriste », « mise en danger de la vie d’autrui » et « complicité de crimes contre l’humanité ».
Après une première annulation de ce dernier chef d’accusation par la Cour d’Appel de Paris en 2019, la Cour de cassation a finalement confirmé en 2021 puis 2022, la mise en examen de Lafarge pour des faits de « complicité de crimes contre l’humanité » qu’il conteste formellement.
Mais malgré une instruction qui dure depuis maintenant six longues années, aucune date de procès n’a été fixée et les investigations se poursuivent toujours sous l’égide de trois magistrats instructeurs.
- La classe politique demande des comptes à la France
La condamnation de Lafarge par la justice américaine pousse naturellement certains élus français à se tourner vers la justice de leur pays pour savoir où en est le volet local de cette affaire aux multiples ramifications.
Dans une déclaration à l’Agence Anadolu, le député NUPES (Nouvelle union populaire écologique et solidaire), Thomas Portes, s’est réjoui de la condamnation américaine de Lafarge dont il estime qu’elle « est une bonne chose ».
« La France, alors que nous avions alerté sur les connivences de Lafarge avec Daech, aurait dû faire la même chose », pointe l’élu de la troisième circonscription de Seine-Saint-Denis.
Pour Clémentine Autain, elle aussi députée de la NUPES « le silence et l’inaction sont coupables ». Dans un message posté sur ses réseaux sociaux, elle rappelle avoir « interpellé le gouvernement tant de fois » au sujet de Lafarge mais « en vain ».
La médiatique députée, Sandrine Rousseau, dénonce, quant à elle, « la complaisance » de l’Exécutif « qui ne dit pas un mot sur cette affaire ».
« Que vaut la vie humaine face aux profits économiques des grandes entreprises ? », s’interroge l’élue au cours d’un entretien à l’Agence Anadolu.
Elle appelle de ses vœux à une « condamnation sévère » pour les faits présumés de « complicité de crime contre l’humanité » pour lesquels Lafarge est inculpé.
Sandrine Rousseau considère, en effet, que « c’est le seul moyen de dissuader » les entreprises qui « privilégient leurs profits au détriment des valeurs humaines et morales ».
Face au silence de l’Elysée comme de Matignon dans ce qui est largement qualifié de scandale, les députés de gauche vont réfléchir , dans les prochains jours, à interpeller le gouvernement lors de la prochaine session de questions à l’Assemblée nationale.
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