
Ile-de-France
AA / Paris / Ümit Dönmez
Telegram pourrait se retirer du marché français. Pavel Durov, fondateur de la messagerie chiffrée, a affirmé ce lundi que son entreprise « préfère quitter un marché plutôt que saper le chiffrement avec des portes dérobées et violer des droits humains de base ».
Par voie d'une publication sur X (anciennement Twitter), Durov réagissait à une demande formulée vendredi par Laurent Nuñez, préfet de police de Paris, en faveur d’un accès des forces de l’ordre aux contenus des messageries chiffrées. Cette requête intervient après plusieurs attaques coordonnées contre des établissements pénitentiaires, imputées à un groupe baptisé « Défense des droits des prisonniers français » (DDPF), qui aurait utilisé Telegram pour planifier ses actions.
Telegram fournit déjà certaines informations aux autorités, comme les adresses IP et les numéros de téléphone de ses utilisateurs. Mais l’entreprise se refuse à livrer le contenu des messages, qu’elle ne peut d’ailleurs pas techniquement décrypter en raison de son système de chiffrement de bout en bout.
Pour Durov, une telle « porte dérobée » serait un non-sens sécuritaire. « Il est techniquement impossible de garantir un accès via une porte dérobée uniquement à la police », affirme-t-il, craignant qu’une telle faille ne soit exploitée par des États étrangers ou des cybercriminels. Il met également en garde contre une atteinte grave à la vie privée de millions de citoyens.
La question de l’accès aux messageries chiffrées fait débat depuis plusieurs mois dans le cadre du projet de loi Narcotrafic. Un amendement controversé, visant à contraindre les plateformes comme Telegram, WhatsApp ou Signal à intégrer de telles portes dérobées, avait été voté au Sénat mais rejeté par l’Assemblée nationale en mars dernier. Une décision saluée par les défenseurs des libertés numériques et par le patron de Telegram lui-même, qui félicite les députés d’avoir « rejeté une loi qui aurait fait de la France le premier pays au monde à priver ses citoyens de leur droit à la vie privée ».
Durov doute par ailleurs de l’efficacité d’une telle mesure contre les criminels. Ces derniers « auraient pu communiquer en toute sécurité via des dizaines d’applications plus petites » ou encore masquer leurs activités grâce à des réseaux privés virtuels (VPN), juge-t-il.