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Trois facteurs à même de garantir la mise en œuvre de la « Déclaration d’Alger » pour la réconciliation palestinienne

- Des experts politiques pensent que la mise en œuvre de l’accord requiert une volonté politique, un plan d’action cohérent et un comité de suivi palestino-arabo-islamique

Majdi Ismail  | 16.10.2022 - Mıse À Jour : 16.10.2022
Trois facteurs à même de garantir la mise en œuvre de la « Déclaration d’Alger » pour la réconciliation palestinienne

Ramallah

AA / Ramallah (Cisjordanie occupée) / Qays Abu Samra

- Les factions palestiniennes ont signé, jeudi, la « Déclaration d’Alger », un nouvel accord en vue d'une réconciliation pour mettre fin à la scission qui se poursuit depuis 2007.

- Des experts politiques pensent que la mise en œuvre de l’accord requiert une volonté politique, un plan d’action cohérent et un comité de suivi palestino-arabo-islamique.

- Des observateurs estiment que la « Déclaration d’Alger » est un pas sur la voie de la fin de la division, tandis que d’autres indiquent qu’il s’agit d’une simple mesure formelle.


Des experts politiques palestiniens estiment que la mise en œuvre de la « Déclaration d’Alger » pour la réconciliation inter-palestinienne requiert une volonté politique de l’ensemble des parties, un plan d’action cohérent et la formation d’un comité palestino-arabo-islamique pour suivre l’application du plan approuvé.

Les factions palestiniennes ont signé, jeudi, la « Déclaration d’Alger » pour la réconciliation et la fin de la scission, sous le parrainage du président algérien Abdelmadjid Tebboune.

Le texte de la Déclaration évoque « l’importance de l’unité nationale comme base de la résistance et de la lutte contre l’Occupation, de la consécration du principe du partenariat politique entre les différentes forces nationales palestiniennes, y compris par la voie d’élections ainsi que de la prise de mesures pratiques pour réaliser la réconciliation nationale en mettant fin à la scission ».

La « Déclaration d’Alger » a évoqué, également, le « renforcement et le développement du rôle de l’Organisation de libération de la Palestine (OLP), la réactivation de ses instances et l’élection du Conseil national palestinien à l’intérieur du pays et à l’étranger dans la mesure du possible, dans un délai maximum d’une année et la tenue rapide d’élections générales, présidentielle et législatives dans un délai d’une année à partir de la date de la signature ».

Le document paraphé par 14 factions palestiniennes a mentionné, par ailleurs, la mise sur pied d’un Groupe de travail algéro-arabe qui sera chargé de la supervision et du suivi des points de l’accord.

Des observateurs palestiniens ont, dans des entretiens séparés accordés au correspondant de l’Agence Anadolu, indiqué que la « Déclaration d’Alger » constitue un pas sur la voie de la fin de la scission, tandis que d’autres ont estimé qu’il s’agit d’une mesure formelle et d’une simple entreprise pour satisfaire l’Algérie, n’ayant rien apporté de plus par rapport aux précédents accords.


* Mise sur pied d’un comité de suivi

Le journaliste palestinien, Mohamed Draghma, a souligné que les factions palestiniennes ont enregistré un grand progrès en signant la « Déclaration d’Alger ».

Il a ajouté que « L’accord évoque un calendrier pour les élections générales. C’est un grand et important progrès qui intervient dans des conditions délicates accompagnant un soulèvement populaire dans les territoires palestiniens contre l’Occupation israélienne ».

Et notre interlocuteur de poursuivre : « Ces factions confirment leur respect du peuple. Elles se réconcilient. C’est une évolution importante ».

Il a ajouté que les factions et l’Autorité palestinienne expriment, à travers cet accord, l’importance du « rôle algérien qui représente le principal appui à l’Autorité et au peuple palestiniens ».

Draghma a relevé, par ailleurs, que « la mise sur pied d’un comité arabe sous la direction de l’Algérie aux fins de suivre la mise en œuvre de l’accord est un point important qui est de nature à œuvrer pour son application sur le terrain. Il s’agit d’un développement extrêmement important ».

Il a, toutefois, relevé que l’application requiert une réelle volonté et de bonnes intentions de la part de l’ensemble des parties.

« Elles (les parties) ont peut-être cette fois-ci une bonne intention, nous surveillons et le peuple palestinien, tout en étant vigilant, attend les impacts de l’accord sur le terrain ».


* Un plan d’action requis

De son côté, Souleiman Bisharat, directeur du Centre « Yabous » pour les Études stratégiques, qui siège à Ramallah dans le centre de la Cisjordanie occupée, a estimé que « la Déclaration d’Alger » a opéré un changement positif dans le dossier de la scission palestinienne ».

Bisharat a ajouté que « le simple fait de se rencontrer, de débattre d’idées et d’outputs de sortie de la crise politique palestinienne intérieure pour mettre fin à la division, est une chose positive ».

Il a relevé, également, l’importance de la constitution d’un comité arabe sous la présidence de l’Algérie pour assurer le suivi de l’exécution des mécanismes de l’accord.

Bisharat a relevé que la concrétisation de l’accord sur le terrain, implique la mise en place d’un plan d’action fondé sur trois axes.

Le premier consiste, a-t-il dit, à former un corps arabe qui soutient la réalisation de la réconciliation avec des pays majeurs qui incitent à cette réconciliation, tels que l’Egypte, la Jordanie et l’Arabie saoudite, voire des pays musulmans qui ont une influence sur les deux protagonistes de la scission, à l’instar de la Türkiye.

Le deuxième axe, selon Bisharat, consiste en une décision politique qui émane des deux parties de la scission (le Fatah et le Hamas) pour veiller à la mise en œuvre des termes de l’accord et à supprimer les écueils qui pourraient l’entraver, tandis que le troisième axe concerne l’apaisement du climat politique en Cisjordanie et dans la Bande de Gaza.

Bisharat a relevé, à ce propos, que l’atmosphère qui prévaut en Cisjordanie est positive et appuie l’application d’un accord d’union, en témoigne le soulèvement populaire contre Israël, qui constitue un élément qui unifie l’ensemble des composantes palestiniennes.


* Une décision politique nécessaire

Dans le même ordre d’idées, l’analyste politique palestinien, Talal Aouke, a souligné que la mise en œuvre de la « Déclaration d’Alger » nécessite une décision politique de la part de l’Autorité palestinienne ainsi que des deux protagonistes de la scission, soit les mouvements Fatah et Hamas.

« A maintes reprises auparavant, des accords avaient été signés mais au stade de l’application, l’échec était au rendez-vous. Pourquoi? Évidemment, à cause de l’absence d’une volonté politique », a-t-il estimé.

« Après la décision politique, il faut mettre en place un plan d’action pratique. Par où nous commencerons? Jusqu’où? Et déterminer aussi des modalités d’application et un échéancier qui fera l’objet d’accord de la part de tous », a-t-il poursuivi.

En dépit de cela, Aouke a affiché son manque d’optimisme quant à la concrétisation de l’accord. Il a dit, à ce propos, que « le document d’Alger ne crée pas une réconciliation. Il s’agit, plutôt, d’une Déclaration formelle en prélude à la tenue du Sommet arabe, portant sur un accord palestinien et sur l’amélioration de l’image des Palestiniens devant les participants au Sommet ».


* Un accord sans importance

A son tour, Bilal Chaoubeki, professeur de sciences politiques à l’Université d’Hébron (al-Khalil, sud de la Cisjordanie), a souligné que l’accord en question « n’a aucune importance ».

Il a motivé son point de vue par le fait que le parti de l’Autorité palestinienne, conduit par le président Mahmoud Abbas (dans une allusion au mouvement Fatah) est prêt à signer un accord général qui n’aura aucun impact sur le terrain et qui pourrait aboutir à la réforme de l’OLP ou à la tenue d’élections ».

Et Chaoubeki de poursuivre : « Quid après la signature? Est-il possible d’organiser des élections? Evidemment que non, dans la mesure où Israël empêche leur tenue à Jérusalem et partant il n’y aura pas d’élections ».

« Le plus important demeure l’exécution. Il n’existe pas d’indices d’où se dégage une intention de l’un des protagonistes de la scission de mettre en œuvre l’accord », a-t-il insisté.

Il a conclu sa déclaration en estimant qu’il « n’est pas possible de mettre fin à la scission dans un avenir proche ».

Les réunions du Dialogue palestinien inclusif pour la réconciliation avaient démarré, mardi, à Alger, avec la participation de 14 factions.

Depuis l’été 2007, la scène palestinienne souffre d’une scission politique et géographique. Le mouvement Hamas contrôle la Bande de Gaza, tandis que la Cisjordanie est dirigée par un gouvernement formé par le mouvement Fatah sous la direction du président Mahmoud Abbas.


*Traduit de l'arabe par Hatem Kattou






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