Rwanda: du privilège d'être femme
Majoritaires au parlement ou chefs d’entreprises, les Rwandaises sont aux premières loges de la société: un modèle à échelle internationale.

AA/Kigali/Henri Demarie
Au Rwanda, la femme occupe une place unique au monde et amplement méritée puisqu’elle est parvenue, en une décennie, à s’imposer comme un fer de lance de la politique, un facteur de développement économique et un moteur social.
Aujourd'hui, sur les 80 députés que compte le parlement, 51 sont des femmes soit environ 64 % des élus. Une avancée unique dans le monde, puisque ce chiffre dépasse largement les attentes des Nations-Unies, qui recommande de fixer au minimum à 30% la présence des femmes à l’Assemblée, rappelle le rapport 2015 de l'Union interparlementaire (organisation internationale des Parlements)
"J'ai 28 ans et je suis la plus jeune députée de notre pays et en tant que femme j’ai conscience qu'il s'agit d'une véritable avancée. J'ai choisi cette carrière car j'aime assumer des responsabilités et jusqu'à présent, tout va bien", se réjouit en ce sens, Justine Mukobwa, députée représentante de la jeunesse rwandaise au sein du parlement, rencontrée par Anadolu.
Cette avancée, comme celles acquises dans les domaines économiques et sociaux, prend naissance dans l’histoire tragique du pays. Au cours du génocide rwandais (1994), entre 250 mille et 500 mille femmes ont été violées et plus de 400 mille sont devenues veuves, selon l’ONU.
Mais loin de se laisser abattre, la Rwandaise est parvenue à dépasser les traumatismes et les stigmates de son histoire, pour asseoir sa force dans le pays en participant à la vie politique et économique.
Au lendemain du génocide, qui a fait plus d'un million de morts, de nombreuses institutions et politiques ont été révisées à l'avantage de la femme. Les multiples réformes gouvernementales ont permis l’émancipation des femmes à tous les niveaux, intégrant, jusque dans la constitution de 2003, l’égalité des sexes.
En plus de prévoir plus de 30 % de représentativité des femmes dans les instances de prises de décisions, la loi dispose que les femmes ont le droit à l’héritage familial sous toutes ces formes.
La prédominance des femmes dans les instances politique a offert une réelle visibilité à la population féminine du Rwanda.
Dans le gouvernement actuel, certains portefeuilles ministériels clés sont confiés à des femmes compétentes, à l’instar de Louise Mushikiwabo qui, selon ses pairs, assume avec brio les fonctions de ministre des affaires étrangères depuis 2009.
Donatille Mukabalisa, quant à elle, dirige le perchoir de la troisième législature du Rwanda, ce qui fait d'elle la deuxième personnalité politique du pays.
Pour cette présidente de la chambre des députés de la troisième législature, rencontrée par Anadolu. « la plupart des femmes sont à la hauteur de leur mission et je ne serai pas étonnée si une femme est élue présidente de la République dans le futur ».
« Je pense qu'au Rwanda nos mentalités ont beaucoup évolué donc si jamais une femme accède à la plus haute fonction du pays, elle se souciera d'équilibrer le tandem homme-femme pour le développement du pays », estime-t-elle.
«Nous les hommes sommes en minorité actuellement à l'Assemblée mais je pense que les femmes ont les capacités de bien gérer les affaires publiques à tous les niveaux. Donc nous n’avons pas de complexe à conjuguer nos efforts pour l'avancement du pays» a jugé, pour sa part, le doyen en âge des députés rwandais, Juvenal Nkusi, dans une déclaration à Anadolu.
Les Rwandaises sont également très présentes dans le domaine économique puisque le pays compte plus de 2 milles femmes entrepreneuses qui évoluent dans presque tous les secteurs d’activités, selon des données récentes et officielles. Le pays a même dédié une chambre aux entrepreneuses.
«Je suis dans l'import-export depuis 5 ans et je suis vraiment fière en tant que femme de faire ce travail qui était auparavant réservé aux hommes dans le pays. Je m'en sors bien et économiquement je dépends moins de mon époux», assure à Anadolu, Vestine Uwamaliya, directrice d'une entreprise d'import-export.
En 2014, deux Rwandaises figuraient dans le palmarès top 50 des femmes influentes dans le monde selon le classement du magazine francophone Jeune Afrique. Il s'agit de la ministre rwandaise des affaires étrangères, Louise Mushikiwabo, et celle chargée des affaires de la communauté de l'Afrique de l'est, Valentine Rugwabiza.
Des modèles, pour près de 6 millions d'autres rwandaises, sur les 12 millions d'habitants que compte le pays.